Au cœur de la tempête : Comment la foi m’a sauvée de mon divorce

« Tu ne comprends donc rien, Claire ? Je ne t’aime plus. »

Ces mots, lancés comme une gifle, résonnent encore dans ma tête, des années après. C’était un soir d’octobre, la pluie battait contre les vitres de notre appartement à Lyon. Je venais de servir le dîner, les enfants riaient dans le salon, et soudain, tout s’est effondré. Marc, mon mari depuis quinze ans, venait de m’annoncer qu’il partait. Il avait rencontré quelqu’un d’autre, une collègue de son bureau, et il voulait refaire sa vie. Je suis restée figée, incapable de pleurer, de crier, de comprendre.

Les jours qui ont suivi furent un cauchemar éveillé. Ma mère, Monique, m’appelait chaque matin : « Ma chérie, il faut que tu manges, pense aux enfants. » Mais comment penser à eux quand on a l’impression de mourir à l’intérieur ? Ma fille, Juliette, 12 ans, me regardait avec des yeux remplis d’inquiétude. Mon fils, Paul, 8 ans, ne comprenait pas pourquoi papa ne rentrait plus le soir. J’étais seule face à la tempête, submergée par la honte et la colère.

Un soir, alors que je rangeais la chambre de Marc – enfin, ce qu’il en restait – je suis tombée sur une vieille Bible offerte par ma grand-mère. Je l’ai ouverte au hasard, et mes yeux sont tombés sur ce verset : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos. » J’ai éclaté en sanglots. Cela faisait des années que je n’avais pas prié. Pourtant, ce soir-là, j’ai parlé à Dieu comme à un vieil ami perdu de vue :

« Seigneur, je ne sais plus quoi faire. Je suis brisée. Aide-moi à tenir pour mes enfants. »

Les semaines suivantes, j’ai commencé à prier chaque soir, parfois en silence, parfois en pleurant. J’ai rejoint un petit groupe de prière à l’église du quartier, où j’ai rencontré Hélène, une femme qui avait traversé la même épreuve. Elle m’a prise dans ses bras sans un mot la première fois que je me suis effondrée devant elle. « Tu n’es pas seule, Claire. Dieu ne t’abandonnera pas. »

Mais la réalité du quotidien était implacable. Les papiers du divorce arrivaient, froids et administratifs. Marc voulait la garde alternée. Il venait chercher les enfants le vendredi soir, et chaque fois que je le voyais, mon cœur se serrait. Un jour, Juliette a explosé :

« Pourquoi tu pleures tout le temps, maman ? C’est de ma faute si papa est parti ? »

Je me suis effondrée à genoux devant elle, la serrant contre moi :

« Non, ma chérie, ce n’est pas ta faute. Ce n’est la faute de personne. »

Mais au fond de moi, je me sentais coupable de tout : de ne pas avoir vu venir la trahison, de ne pas avoir été assez forte, de ne pas réussir à protéger mes enfants de cette douleur.

Un matin, alors que je déposais Paul à l’école, la directrice m’a prise à part :

« Madame Lefèvre, Paul est très renfermé en ce moment. Il a du mal à se concentrer. Peut-être qu’il aurait besoin d’en parler avec quelqu’un ? »

J’ai compris que je ne pouvais pas tout porter seule. J’ai accepté l’aide d’une psychologue scolaire pour les enfants, et j’ai continué à m’accrocher à la prière. Petit à petit, la douleur est devenue moins vive. J’ai recommencé à rire avec Juliette, à jouer avec Paul. J’ai repris mon travail de professeure de français au collège, même si chaque matin était une épreuve.

Un dimanche de printemps, alors que je sortais de la messe, Marc m’a appelée. Il voulait me parler. Nous nous sommes retrouvés dans un café près de la place Bellecour. Il avait l’air fatigué, vieilli.

« Claire, je suis désolé pour tout ce que je t’ai fait subir. Je n’ai pas été à la hauteur. »

Je l’ai regardé longtemps, sans haine. J’ai compris que le pardon ne venait pas de lui, mais de moi. J’avais besoin de me libérer de cette colère pour avancer.

Ce soir-là, j’ai prié plus fort que jamais :

« Merci, Seigneur, de m’avoir donné la force de pardonner. »

Aujourd’hui, deux ans après ce séisme, je ne suis plus la même femme. J’ai appris à vivre seule, à aimer mes enfants différemment, à me reconstruire. La foi ne m’a pas épargnée la douleur, mais elle m’a donné la force de traverser l’orage. J’ai rencontré d’autres femmes à l’église, comme Sophie ou Nadège, qui ont partagé leurs histoires et leurs larmes. Ensemble, nous avons créé un groupe de soutien pour les femmes divorcées du quartier.

Parfois, la solitude me pèse encore. Parfois, la colère revient, surtout quand je vois Marc heureux avec sa nouvelle compagne. Mais je me rappelle chaque jour que la vie continue, que Dieu veille sur moi et mes enfants.

Je me demande souvent : combien de femmes souffrent en silence, persuadées qu’elles sont seules ? Et si, au lieu de cacher nos blessures, nous osions en parler, prier ensemble, nous soutenir ? Peut-être que la foi n’est pas la réponse à tout, mais elle a été mon ancre dans la tempête.

Et vous, qu’est-ce qui vous a aidée à tenir quand tout s’effondrait ? Est-ce que la foi peut vraiment nous sauver du désespoir ?