Renvoyée du bal pour une robe à fleurs : mon combat contre l’injustice
« Camille, tu ne peux pas entrer. » La voix sèche de Madame Lefèvre, la CPE, résonne encore dans ma tête. Je reste figée devant la porte du gymnase, les mains tremblantes sur le tissu fleuri de ma robe. Autour de moi, les autres élèves avancent, rient, prennent des selfies. Moi, je suis là, plantée comme une idiote, le cœur battant trop fort.
« Mais pourquoi ? » Ma voix se brise. Je sens déjà les larmes monter.
Madame Lefèvre soupire, sans même me regarder dans les yeux : « Le règlement est clair, Camille. Les robes doivent être unies et arriver au moins aux genoux. La tienne est trop voyante… et trop courte. »
Je baisse les yeux sur ma robe. Elle m’arrive juste au-dessus du genou, certes, mais elle n’a rien d’indécent. C’est la robe préférée de ma mère, celle qu’elle portait à son propre bal en 1989. Elle me l’a confiée ce matin-là, les yeux brillants de fierté et d’émotion : « Tu verras, tu seras magnifique. »
Je tente de protester : « Mais il y a d’autres filles avec des robes plus courtes que la mienne ! »
Madame Lefèvre hausse les épaules : « Ce n’est pas la même chose. Retourne chez toi, Camille. »
Je sens le regard des autres sur moi. Certains chuchotent, d’autres détournent les yeux. Je sors en courant, la gorge serrée, et m’effondre sur le trottoir du parking. Mon maquillage coule sur mes joues. J’attrape mon téléphone et compose le numéro de Chloé.
« Allô ? Camille ? Qu’est-ce qui se passe ? »
Je n’arrive même pas à parler. Je sanglote, je suffoque. Chloé comprend tout de suite : « Attends-moi, je sors ! »
Quelques minutes plus tard, elle me rejoint, essoufflée, en talons hauts. Elle me serre fort dans ses bras : « Ils n’ont pas le droit de te faire ça ! Ta robe est superbe ! »
Je secoue la tête : « Ils disent qu’elle est trop voyante… Trop courte… »
Chloé fulmine : « C’est n’importe quoi ! Tu sais très bien que Lucie est entrée avec une mini-robe rouge et personne n’a rien dit ! »
Je me sens humiliée, trahie par cette école où j’ai toujours fait des efforts pour être irréprochable. J’ai envie de hurler, de tout casser. Mais je n’ai plus la force.
Chloé reste avec moi sur le parking jusqu’à ce que mes parents arrivent. Ma mère descend de la voiture en courant : « Qu’est-ce qui s’est passé ? »
Je lui raconte tout, en pleurant dans ses bras. Mon père serre les poings : « C’est une honte ! On va écrire au proviseur ! »
Mais au fond de moi, je sais que ça ne changera rien. L’école trouvera toujours une excuse pour justifier ses décisions arbitraires.
Le lendemain, les rumeurs circulent déjà dans tout le lycée. Certains disent que j’ai cherché à provoquer ; d’autres compatissent en silence. Je me sens seule contre tous.
À la maison, l’ambiance est tendue. Ma mère culpabilise : « J’aurais dû te donner une autre robe… » Mon père peste contre l’injustice du système scolaire français : « Toujours à juger sur l’apparence ! »
Le soir, Chloé m’appelle : « Tu sais quoi ? Ma cousine Anaïs a son bal samedi prochain à Bordeaux. Elle t’invite ! »
Au début, je refuse : « Je ne veux plus jamais entendre parler de bal… » Mais Chloé insiste : « Ce serait l’occasion de tourner la page… Et puis tu pourrais porter ta robe à fleurs, personne ne dira rien là-bas ! »
Finalement, j’accepte. Le samedi suivant, nous prenons le train pour Bordeaux. Anaïs m’accueille à bras ouverts : « Ta robe est magnifique ! Viens, on va s’amuser ! »
Pour la première fois depuis des jours, je me sens à ma place. Personne ne me juge ici ; on me complimente même sur ma tenue. Je danse jusqu’au bout de la nuit avec Chloé et Anaïs, riant comme si rien ne s’était passé.
Sur le chemin du retour, je repense à tout ce qui s’est passé. Pourquoi tant d’injustice pour une simple robe ? Pourquoi juge-t-on encore les filles sur leur apparence en 2024 ?
Je regarde Chloé et lui demande doucement : « Est-ce qu’un jour on pourra être nous-mêmes sans avoir peur du regard des autres ? Est-ce que ça vaut vraiment la peine de se battre pour être acceptées telles qu’on est ? »