Lâcher prise : Mon combat pour la paix après l’amour perdu

« Tu l’as vu ? » La voix de Camille tremble à l’autre bout du fil. Je serre mon portable si fort que mes jointures blanchissent. Oui, je l’ai vu. Antoine. Mon Antoine. Enfin, celui qui l’a été pendant cinq ans. Il marchait sur le quai de la gare de Lyon, sa main enlacée à celle d’une fille que je ne connais pas. Ils riaient. J’ai eu l’impression que le sol s’ouvrait sous mes pieds.

Je raccroche sans répondre. Je me précipite dans la salle de bains, m’appuie contre le lavabo, et je me regarde dans le miroir. Mes yeux sont rouges, gonflés. Je me répète : « Ce n’est rien, tu vas t’en remettre. » Mais je n’y crois pas.

Le soir, à table, Maman me lance un regard inquiet. « Tu n’as presque rien mangé, Maëlle. Tu veux en parler ? »

Je secoue la tête. Papa hausse les épaules : « Laisse-la, elle a besoin de temps. »

Mais du temps, j’en ai trop. Les journées s’étirent, vides, interminables. Je ne dors plus. Je tourne en rond dans ma chambre d’étudiante à Paris, relis nos anciens messages sur mon téléphone, ressasse chaque détail de notre rupture. Antoine m’a quittée il y a trois mois. Il disait qu’il avait besoin de liberté, qu’il ne savait plus où il en était. J’ai cru qu’il reviendrait.

Et puis ce matin-là, tout s’est effondré.

Je me suis effondrée aussi.

Camille insiste pour qu’on se voie. « Viens à la messe dimanche avec moi », propose-t-elle. Je ris jaune : « Tu sais bien que je n’y crois plus depuis longtemps… »

Mais elle insiste, alors j’y vais. L’église Saint-Paul est froide, mais pleine de lumière. Je m’assois au fond, les bras croisés sur la poitrine. Le prêtre parle du pardon, du lâcher-prise. Je sens mes larmes couler sans pouvoir les retenir.

Après la messe, Camille me serre dans ses bras : « Tu n’es pas obligée d’y croire pour demander de l’aide. »

Cette phrase me hante toute la semaine suivante.

Je commence à prier le soir, maladroitement. Je ne sais pas à qui je parle vraiment — à Dieu ? À moi-même ? — mais je parle. Je dis ma colère, ma tristesse, ma jalousie surtout. Je supplie qu’on m’enlève cette douleur qui me ronge.

Un soir, alors que je suis au bord des larmes, Papa frappe à ma porte : « Maëlle… tu sais, on ne guérit pas d’un chagrin d’amour en se refermant sur soi-même. »

Je lui crie dessus : « Tu ne comprends rien ! »

Il ne répond pas tout de suite. Puis il murmure : « J’ai perdu quelqu’un aussi, tu sais… »

Je n’avais jamais pensé à lui comme un homme blessé.

Les semaines passent. Je continue à prier chaque soir, parfois en silence, parfois à voix haute quand je suis seule dans mon studio. Petit à petit, la douleur devient moins vive. J’accepte de sortir avec Camille et ses amis ; je ris à nouveau, timidement.

Un dimanche matin, je croise Antoine au marché Bastille. Il me sourit poliment : « Salut Maëlle… tu vas bien ? »

Je sens mon cœur se serrer mais je réponds : « Oui… et toi ? »

Il hoche la tête : « Ça va. » Sa nouvelle copine arrive derrière lui ; ils s’éloignent ensemble.

Je reste là quelques secondes, le souffle court. Mais cette fois, je ne pleure pas.

Le soir-même, je prie encore : « Merci… merci de m’avoir aidée à tenir debout aujourd’hui. »

À table, Maman me regarde longuement : « Tu as changé… tu sembles plus apaisée. »

Je souris faiblement : « J’essaie juste d’accepter ce que je ne peux pas changer. »

Mais certains soirs sont encore difficiles. Parfois la jalousie revient comme une vague sourde ; parfois je rêve d’Antoine et je me réveille en pleurs.

Un soir d’orage, alors que la pluie frappe violemment contre les vitres de mon studio parisien, j’écris dans mon journal :

« Est-ce qu’on guérit vraiment un jour ? Ou est-ce qu’on apprend juste à vivre avec nos cicatrices ? »

Et vous… avez-vous déjà dû apprendre à lâcher prise pour retrouver la paix ?