Juste après l’accouchement, j’ai découvert le vrai visage de l’homme que j’aimais
« Tu comptes lui dire quand ? »
La phrase s’affiche sur l’écran du téléphone de Julien, mon compagnon depuis quatre ans, alors que je tends la main pour vérifier l’heure. Il est 3h17 du matin, la petite Zoé dort enfin dans le berceau transparent de la maternité de Nantes. Je suis épuisée, vidée, mais ce message, reçu il y a à peine quelques minutes, me glace le sang. Mon cœur bat si fort que j’ai l’impression qu’il va réveiller tout le service.
Je relis le message, incrédule. L’expéditrice s’appelle Camille. Je ne connais aucune Camille dans l’entourage de Julien. Je pose le téléphone sur la table de chevet, mes mains tremblent. Je me tourne vers lui. Il dort profondément sur le fauteuil d’appoint, la bouche entrouverte, inconscient du séisme qui vient de s’abattre sur moi.
Je tente de me raisonner : c’est sûrement une erreur, un malentendu… Mais la curiosité me ronge. J’ouvre la conversation. Les messages défilent sous mes yeux :
Camille : « Tu comptes lui dire quand ? »
Julien : « Je ne peux pas maintenant, elle vient d’accoucher… »
Camille : « Tu m’avais promis. Je ne veux plus être la femme de l’ombre. »
Julien : « Je te jure que je vais gérer ça, laisse-moi juste un peu de temps. »
Le monde s’effondre. Je relis chaque mot, chaque phrase. Tout devient flou autour de moi. Je sens les larmes monter, mais je les retiens. Pas maintenant. Pas devant Zoé.
Je me souviens de notre rencontre à la fac de droit à Rennes, des soirées étudiantes, des premiers baisers volés sous la pluie bretonne. On avait tout construit ensemble : notre petit appartement à Saint-Herblain, nos vacances à Biarritz, nos projets d’avenir… Et maintenant ? Tout ça n’était-il qu’un mensonge ?
Je repense à ces derniers mois où Julien était souvent absent, prétextant des réunions tardives ou des week-ends chez ses parents à Angers. J’avais mis ça sur le compte du stress au travail et des préparatifs pour l’arrivée du bébé. J’étais naïve.
La porte de la chambre s’ouvre doucement. Une infirmière entre pour vérifier ma tension et celle de Zoé. Je ravale mes larmes et souris faiblement. Elle me félicite encore pour la naissance et repart aussi vite qu’elle est venue.
Julien se réveille en sursaut. Il me regarde, sourit tendrement :
— Ça va mon cœur ? Tu veux que je t’apporte un verre d’eau ?
Je le fixe sans répondre. Il remarque mon regard durci.
— Qu’est-ce qu’il y a ?
Je tends son téléphone vers lui.
— Tu veux m’expliquer ce que c’est ?
Il pâlit instantanément. Son regard fuit le mien. Il balbutie :
— Écoute… C’est compliqué… Je voulais t’en parler mais…
Je l’interromps, la voix tremblante :
— Depuis combien de temps tu me mens ? Depuis combien de temps tu vois cette Camille ?
Il baisse la tête.
— Ça fait quelques mois… Mais je t’assure que je t’aime, que je veux être là pour toi et pour Zoé…
Je ris nerveusement.
— Tu m’aimes ? Tu m’aimes au point de me trahir alors que je portais ton enfant ?
Il tente de s’approcher mais je recule instinctivement.
— Sors d’ici, Julien. Laisse-moi tranquille.
Il hésite puis quitte la chambre sans un mot, refermant doucement la porte derrière lui.
Je reste seule avec Zoé qui dort paisiblement, inconsciente du chaos qui vient d’éclater dans sa famille à peine quelques heures après sa naissance. Je caresse sa petite main minuscule et me demande comment je vais faire face à tout ça.
Le lendemain matin, ma mère arrive à la maternité avec un bouquet de pivoines. Elle remarque tout de suite mon visage fermé.
— Qu’est-ce qui se passe, ma chérie ?
Je fonds en larmes dans ses bras. Elle comprend sans que j’aie besoin d’expliquer en détail. Elle m’aide à m’occuper de Zoé et me promet qu’on trouvera une solution ensemble.
Les jours suivants sont un mélange d’épuisement physique et de tempête émotionnelle. Julien tente de m’appeler, m’envoie des messages auxquels je ne réponds pas. Ma belle-famille débarque à la maternité avec des cadeaux pour Zoé, ignorant tout du drame qui se joue en coulisses.
À mon retour à la maison, tout me rappelle Julien : sa veste sur le porte-manteau, son mug préféré dans l’évier, les photos de nous accrochées au mur du salon. Je me sens trahie mais aussi terriblement seule face à ce nouveau rôle de mère célibataire que je n’ai pas choisi.
Un soir, alors que Zoé pleure sans raison apparente et que je suis au bord de la crise de nerfs, ma meilleure amie Claire débarque avec une tarte aux pommes et une bouteille de jus d’orange.
— Tu n’es pas seule, Lucie. On va t’aider à traverser ça.
On parle jusqu’à tard dans la nuit. Elle m’encourage à consulter une conseillère conjugale pour essayer d’y voir plus clair et prendre les bonnes décisions pour moi et pour Zoé.
Les semaines passent. Julien insiste pour voir sa fille mais je pose mes conditions : il devra être honnête avec moi et surtout respecter notre équilibre fragile. Camille finit par m’envoyer un message elle aussi : « Je suis désolée pour tout ça… » Je ne lui réponds pas. Je n’en ai pas la force.
Aujourd’hui, cela fait trois mois que Zoé est née. J’apprends chaque jour à être mère et à reconstruire ma vie sans Julien. La douleur est toujours là mais je sens aussi une force nouvelle grandir en moi.
Est-ce qu’on peut vraiment se relever d’une telle trahison ? Est-ce qu’on peut encore croire en l’amour après ça ? Qu’auriez-vous fait à ma place ?