J’ai mis dehors la tante de mon mari : son insolence a tout détruit

« Tu pourrais au moins faire un effort, Camille. Elle veut juste te rencontrer. »

La voix de Jean tremble à peine, mais je sens déjà la tension monter en moi. Je serre la poignée de la porte d’entrée, le cœur battant. Derrière, j’entends le bruit sec des talons de Françoise sur le carrelage du couloir. Elle est là, enfin revenue du Canada après tant d’années, la fameuse tante dont tout le monde parle dans la famille de Jean. Celle qui n’a pas pu venir à notre mariage, celle qui a toujours eu un mot à dire sur tout, même à distance.

Je prends une inspiration, j’ouvre. Elle me dévisage, un sourire pincé aux lèvres. « Ah, c’est donc toi, Camille ? Tu es plus petite que ce que j’imaginais. »

Jean tente de détendre l’atmosphère : « Françoise, tu veux un café ? »

Elle l’ignore et continue : « Et tu travailles toujours dans… comment ça s’appelle déjà ? Ah oui, la petite bibliothèque municipale ? »

Je sens mes joues chauffer. Je réponds poliment, mais déjà je comprends : cette femme est venue avec ses jugements et son mépris.

Les jours suivants sont un calvaire. Françoise s’installe chez nous comme si elle était chez elle. Elle critique tout : la décoration (« C’est un peu vieillot, non ? »), ma cuisine (« Tu ne sais pas faire une vraie blanquette ? »), même ma façon d’élever notre fils Paul (« Il est trop gâté, ce petit. À mon époque… »). Jean essaie de temporiser, mais il baisse les yeux dès qu’elle hausse le ton.

Un soir, alors que je débarrasse la table, j’entends Françoise dans le salon avec Jean : « Tu aurais pu choisir mieux, tu sais. Camille n’est pas à la hauteur de notre famille. »

Je m’arrête net. Mon cœur se serre. Jean ne répond rien. Je me sens trahie.

La nuit suivante, je dors mal. Je repense à toutes ces petites humiliations, ces regards en coin, ces soupirs exaspérés chaque fois que je parle de mon travail ou de mes projets. Je me demande si je suis vraiment à ma place ici.

Le lendemain matin, alors que Paul joue dans sa chambre, Françoise entre dans la cuisine et me lance : « Tu devrais songer à reprendre des études. Tu pourrais au moins essayer d’être intéressante pour Jean. »

Je sens une colère froide monter en moi. Je pose la tasse que je tiens et je la regarde droit dans les yeux : « Ça suffit, Françoise. Vous êtes chez moi ici, et je ne vous permets pas de me parler ainsi. »

Elle ricane : « Oh, tu te rebiffes maintenant ? Il était temps ! Mais tu sais, dans notre famille, on ne tolère pas la médiocrité. »

Je n’en peux plus. Je monte voir Jean dans notre chambre. Il est assis sur le lit, l’air fatigué. « Jean, il faut qu’elle parte. Je ne peux plus supporter ça. Elle me détruit à petit feu et tu ne dis rien ! »

Il soupire : « C’est ma tante… Elle a toujours été comme ça… »

« Et alors ? Tu préfères la laisser me piétiner plutôt que de défendre ta femme ? »

Il baisse les yeux. Je comprends qu’il ne m’aidera pas.

Je redescends. Françoise est dans le salon, les pieds sur la table basse. Je prends mon courage à deux mains : « Françoise, je vous demande de quitter notre maison aujourd’hui. »

Elle éclate de rire : « Tu plaisantes ? Jean ne te laissera jamais faire ça ! »

Jean descend à ce moment-là. Il voit mon regard déterminé et celui, narquois, de sa tante.

« Jean », dis-je d’une voix tremblante mais ferme, « c’est elle ou moi. Je ne peux plus vivre comme ça. »

Un silence glacial s’installe. Paul arrive en courant : « Maman ? Pourquoi tu cries ? »

Je m’agenouille pour le prendre dans mes bras. Je sens les larmes monter.

Jean regarde sa tante puis moi. Il hésite longuement puis dit enfin : « Françoise… il vaut mieux que tu partes. »

Elle se lève brusquement, furieuse : « Tu choisis cette fille plutôt que ta famille ? Tu es bien faible ! »

Elle claque la porte derrière elle quelques minutes plus tard.

Le soir venu, la maison semble vide mais apaisée. Jean ne parle pas beaucoup ; il semble perdu dans ses pensées. Moi aussi.

J’ai mis dehors la tante de mon mari pour protéger ma dignité et celle de mon fils. Mais au fond de moi, une question me hante : ai-je détruit quelque chose d’irréparable dans notre famille ? Ou bien ai-je enfin posé une limite nécessaire ?

Et vous… jusqu’où seriez-vous prêts à aller pour défendre votre place dans votre propre maison ?