L’Inattendu Potentiel de Camille
« Maman, pourquoi les arbres ne poussent pas en ligne droite ? » La voix curieuse de Camille résonne dans la pièce, interrompant le silence studieux de notre petit appartement. Je lève les yeux de mes plans d’architecte paysagiste, un peu agacée par cette énième question. « Parce que la nature est ainsi faite, ma chérie », réponds-je distraitement, espérant qu’elle se contente de cette réponse simpliste.
Mais Camille n’est pas une enfant qui se satisfait de réponses faciles. Elle fronce les sourcils, son petit visage se plissant dans une expression de réflexion intense. « Mais pourquoi ? » insiste-t-elle, ses yeux pétillants d’une curiosité insatiable.
Je soupire intérieurement. Entre mon travail exigeant et les responsabilités de mère célibataire, je n’ai guère le temps ni l’énergie pour encourager ses explorations incessantes. Pourtant, quelque chose dans son regard me rappelle mes propres rêves d’enfant, ceux que j’ai dû mettre de côté pour affronter la réalité.
« Camille, je dois finir ces plans pour demain », dis-je d’un ton plus ferme que je ne le voudrais. Elle baisse les yeux, déçue mais résignée. Je me sens coupable, mais je me dis que c’est pour son bien. Après tout, elle doit apprendre à être réaliste.
Les jours passent et je continue à jongler entre mon travail et mes devoirs de mère. Camille, elle, continue à poser des questions, à dessiner des croquis de jardins imaginaires sur ses cahiers d’école. Un soir, alors que je suis plongée dans mes dossiers, elle vient me voir avec un dessin qu’elle a fait. « Regarde, maman ! C’est un jardin où les arbres poussent en spirale ! »
Je prends le dessin entre mes mains et je suis frappée par la beauté et l’originalité de son idée. Mais au lieu de l’encourager, je lui dis : « C’est joli, Camille, mais ce n’est pas très pratique dans la vraie vie. »
Elle hoche la tête, mais je vois bien qu’elle est déçue. Cette nuit-là, alors que je me tourne et me retourne dans mon lit, je ne peux m’empêcher de penser à son dessin. Pourquoi ai-je été si prompte à éteindre sa flamme créative ?
Le lendemain matin, alors que je prépare le petit-déjeuner, Camille s’approche timidement. « Maman, est-ce que je pourrais t’aider avec tes plans aujourd’hui ? »
Je suis sur le point de refuser par habitude, mais quelque chose me retient. Peut-être est-ce la fatigue ou la culpabilité qui me ronge depuis la veille. « D’accord », dis-je finalement. « Mais tu devras être très attentive et suivre mes instructions. »
Ses yeux s’illuminent et elle acquiesce vigoureusement. Ensemble, nous passons la journée à travailler sur mes projets. Je suis étonnée par sa capacité à comprendre des concepts complexes et par sa créativité débordante.
Au fil des semaines, je commence à lui confier de petites tâches et à écouter ses idées avec plus d’ouverture. Je découvre en elle un potentiel que je n’avais jamais soupçonné. Elle m’apprend à voir le monde sous un angle différent, à remettre en question mes propres certitudes.
Un jour, alors que nous travaillons ensemble sur un projet particulièrement difficile, elle propose une solution ingénieuse à un problème qui me semblait insoluble. Je suis stupéfaite par sa perspicacité et je réalise soudain combien j’ai sous-estimé ses capacités.
« Camille », dis-je en la regardant droit dans les yeux, « tu es incroyable. Je suis tellement fière de toi. »
Elle me sourit avec une telle joie que mon cœur se serre d’émotion. À cet instant précis, je comprends que mon rôle en tant que mère n’est pas seulement de lui fournir des réponses toutes faites, mais de lui offrir les opportunités d’explorer et de grandir.
En repensant à tout cela, je me demande : combien d’autres enfants comme Camille ont un potentiel caché que nous négligeons par manque de temps ou par peur du changement ? Ne devrions-nous pas tous prendre le temps d’écouter et d’encourager leurs rêves ?