Oubliée par Tous : Le Dernier Testament de Mamie Jeanne

La pluie battait contre les fenêtres de ma vieille maison en pierre, créant une symphonie mélancolique qui résonnait dans chaque pièce vide. Je me tenais là, dans le salon, regardant les gouttes d’eau tracer des chemins sinueux sur le verre. « Pourquoi suis-je devenue une étrangère pour ma propre famille ? » me demandais-je à voix haute, ma voix se perdant dans le silence oppressant.

Il fut un temps où cette maison était remplie de rires et de cris joyeux. Mon fils Thomas et ses enfants, Émile, Théo et Alice, couraient dans les couloirs, leurs pas résonnant comme une douce musique à mes oreilles. Mais les années ont passé, et peu à peu, ils ont cessé de venir. Les appels se sont espacés, les visites sont devenues rares, jusqu’à ce que je ne sois plus qu’un souvenir lointain pour eux.

Un jour, alors que je feuilletais un vieil album photo, je suis tombée sur une image de nous tous réunis autour de la table du salon. J’ai senti une larme rouler sur ma joue. « Je dois faire quelque chose avant qu’il ne soit trop tard, » me suis-je dit. C’est ainsi que j’ai décidé de rédiger mon testament.

Je savais que c’était la seule façon de les faire revenir, même si ce n’était que pour un bref instant. J’ai pris un stylo et du papier, et j’ai commencé à écrire. Chaque mot était un adieu silencieux, une tentative désespérée de renouer avec eux. J’ai laissé des lettres pour chacun d’eux, espérant qu’ils comprendraient enfin combien ils comptaient pour moi.

Quelques semaines plus tard, alors que je regardais par la fenêtre, j’ai vu une voiture s’arrêter devant la maison. Mon cœur s’est emballé. C’était Thomas. Il est sorti de la voiture, suivi d’Émile, Théo et Alice. Ils avaient l’air hésitants, presque étrangers à cet endroit qui avait autrefois été leur deuxième maison.

« Maman, » a dit Thomas en entrant, sa voix tremblante d’émotion. « Nous avons reçu ton testament. » Il y avait tant de choses que je voulais lui dire, mais les mots restaient coincés dans ma gorge.

Émile s’est approché de moi et m’a pris la main. « Mamie, pourquoi ne nous as-tu pas dit que tu te sentais si seule ? » Sa question m’a transpercé le cœur. « Je ne voulais pas être un fardeau, » ai-je murmuré.

Alice a éclaté en sanglots. « Nous aurions dû être là pour toi, » a-t-elle dit entre deux sanglots. Théo est resté silencieux, mais ses yeux parlaient pour lui.

Nous avons passé la journée ensemble, à parler du passé et à essayer de combler le fossé qui s’était creusé entre nous. Pour la première fois depuis longtemps, j’ai ressenti un semblant de paix.

Mais le temps était compté. Quelques jours plus tard, je me suis éteinte paisiblement dans mon sommeil. Mon dernier souhait avait été exaucé : retrouver ma famille avant qu’il ne soit trop tard.

Aujourd’hui, alors que je regarde d’en haut, je me demande : pourquoi faut-il souvent attendre qu’il soit trop tard pour réaliser ce qui est vraiment important ? Peut-être que mon histoire incitera d’autres à ne pas commettre la même erreur.